Notion de reprise d’activité préexistante : Bercy s'aligne sur la jurisprudence

S’alignant sur la jurisprudence du Conseil d’État, l’administration précise que constitue une reprise toute opération au terme de laquelle est reprise la direction effective d’une entreprise existante avec la volonté non équivoque de maintenir la pérennité de cette entreprise.

Dans les zones de revitalisation rurale (ZRR), les entreprises créées ou reprises entre le 1-1-2011 et le 30-6-2024 peuvent bénéficier, sous certaines conditions et dans certaines limites, d’une exonération totale (60 mois) puis partielle (36 mois) d’impôt sur les bénéfices (CGI art. 44 quindecies).

Sont ainsi éligibles au régime de faveur, les entreprises qui reprennent des activités préexistantes, quelles que soient les modalités de cette reprise (acquisition, location-gérance ou simple transfert) ou les modifications pouvant intervenir dans l’activité initiale (changement du mode d’exploitation ou de l’organisation, transfert géographique ou accroissement du potentiel productif), sous réserve toutefois de certaines conditions.

Jusqu’à présent, l’administration considérait que la reprise d’une activité préexistante pour le bénéfice de ce régime de faveur est caractérisée par la réunion de 3 éléments :

  • la nouvelle entreprise est une structure juridiquement nouvelle ;
  • l’activité exercée par l’entreprise nouvellement créée doit être identique à celle d’une entreprise préexistante ;
  • la nouvelle entreprise reprend en droit ou en fait des moyens d’exploitation d’une entreprise préexistante (clientèle, locaux, matériels, salariés, fonds de commerce, etc.).

Par tolérance, elle admet que la reprise d’une activité préexistante soit également caractérisée par l’acquisition de plus de 50 % des titres d’une société (lorsque cette acquisition ne s’accompagne pas d’un changement d’activité) (BOI-BIC-CHAMP 80-10-70-20 du 4-9-2019 n° 70).

Dans une décision du 16-7-2020, le Conseil d’État avait censuré les commentaires administratifs restreignant la définition de la notion de reprise d’entreprise préexistante pour le bénéfice de l’exonération en ZRR et avait précisé la condition même de reprise (CE 16-7-2020 n° 440269). Selon lui, il résulte des dispositions de l’article 44 quindecies du CGI, éclairées par les travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de ce texte, que « la reprise d’entreprise ouvrant droit à l’exonération qu’elles instaurent s’entend de toute opération au terme de laquelle est reprise la direction effective d’une entreprise existante avec la volonté non équivoque de maintenir la pérennité de cette entreprise. Par suite, une telle reprise ne suppose pas nécessairement et uniquement la création d’une structure juridiquement nouvelle ou le rachat de plus de 50 % des titres d’une société ». Le Conseil d’État a alors annulé en conséquence la doctrine administrative (BOI-BIC-CHAMP-80-10-70-20 nos 60 et 70) en tant qu’elle fixe, dans le silence des textes, une règle nouvelle entachée d’incompétence.

Dans une mise à jour de sa base Bofip en date du 12 juin 2024, l’administration aménage les commentaires relatifs aux exonérations d’impôt sur les bénéfices applicables dans les ZRR (CGI art. 44 quindecies), les bassins urbains à dynamiser (CGI art. 44 sexdecies) et les zones de développement prioritaire (CGI art. 44 septdecies) afin d’y intégrer la définition de la reprise d’activités préexistantes issue de la jurisprudence.

Elle intègre ainsi la décision précitée du Conseil d’État selon laquelle une reprise d’entreprise s’entend de toute opération au terme de laquelle est reprise la direction effective d’une entreprise existante avec la volonté non équivoque de maintenir la pérennité de cette entreprise. Par suite, une telle reprise ne suppose pas nécessairement et uniquement la création d’une structure juridiquement nouvelle ou le rachat de plus de 50 % des titres d’une société. L’administration précise que la date de reprise constituant le point de départ pour le décompte de la période d’exonération correspond au moment où intervient de façon effective le changement de direction. Elle ajoute que la reprise d’une activité exercée en ZRR peut s’effectuer par l’acquisition de titre de la société d’exercice de ladite activité (CAA Nancy 24-9-2020 n° 19NC00247). Toutefois, le capital de l’entreprise créée ou reprise ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d’autres sociétés. L’administration précise que demeurent exclues du régime de faveur les reprise d’activité d’une société implantée en ZRR par acquisition de plus de 50 % de ses titres via une autre société.

Afin d’illustrer cette notion de reprise d’activité, l’administration ajoute de nouveaux exemples.

Exemple

Une société en nom collectif (SNC) exploite un fonds de commerce de journaux, librairie et papeterie implanté en ZRR qui ne bénéficie pas de l'exonération. La SNC a deux associés M. A et Mme B qui détiennent respectivement 49 % et 51 % des parts. Mme B souhaite transmettre ses parts à M. A. La donation par la gérante de droit et associée majoritaire de ses parts à son associé afin qu'il puisse poursuivre de manière pérenne la direction effective de la société constitue une reprise d’activité tel qu'interprétée par le juge de l'impôt, toutes les autres conditions devant par ailleurs être remplies.

À noter. L'administration avait déjà été amenée à préciser, dans une réponse ministérielle, qu'une entreprise peut bénéficier du régime en faveur des ZRR au titre d'une opération de reprise dès lors qu'est caractérisée la reprise de la direction effective, peu important le rythme d'acquisition des parts (Rép. Cozic : Sén. 31-8-2023 n° 7331).

BOI-BIC-CHAMP-80-10-70-20, BOI-BIC-CHAMP-80-10-90-20, BOI-BIC-CHAMP-80-10-100-20 du 12-6-2024

© Lefebvre Dalloz

 

 

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